Le transfert des onze dauphins de Planète Sauvage (Port-Saint-Père, Loire-Atlantique) vers le ZooParc de Beauval d’ici mars-avril 2027 marque une étape historique.
Annoncé le 6 novembre 2025 par Rodolphe Delord, PDG de Beauval, ce projet accompagne la fermeture définitive du delphinarium nantais et la création d’un Centre d’Études, de Recherche Scientifique et de Sauvegarde pour Dauphins (CERSSD), unique en Europe.
À retenir :
- 11 dauphins transférés de Planète Sauvage à Beauval ;
- un centre inédit dédié à la recherche et à la conservation ;
- un investissement de 25 millions d’euros ;
- une application concrète de la loi sur la maltraitance animale de 2021.
Un centre scientifique européen pour réinventer la place des dauphins en captivité
Selon le ministère de la Transition écologique, ce nouveau centre de référence pour dauphins accueillera des animaux issus de delphinariums européens dans un environnement « repensé pour leur bien-être ». Les installations s’étendront sur 25 000 m², avec sept bassins, dont trois lagons paysagers contenant 30 000 m³ d’eau de mer reconstituée.
Le projet, financé entièrement par Beauval (estimé à 20-25 millions €), inclut :
- des plages et rochers artificiels,
- des zones de courant et de vagues,
- des espaces pédagogiques pour l’observation sous-marine.
Les travaux débuteront en février 2026 pour une ouverture au printemps 2027. Selon le PDG de Beauval, il s’agit d’« une première mondiale » en matière d’éthique animale.
La loi de 2021 change la donne pour les cétacés en France
Ce transfert s’inscrit dans le cadre de la loi du 30 novembre 2021 relative à la lutte contre la maltraitance animale. Elle interdit :
- les spectacles de cétacés à partir de décembre 2026,
- la reproduction et la détention des dauphins et orques hors cadre scientifique,
- tout contact direct entre public et animaux.
Le CERSSD bénéficie d’une exception scientifique permettant de poursuivre les recherches sur la santé, la communication et l’immunité des cétacés. Selon RTL, le ministre Mathieu Lefèvre a salué un projet « responsable et utile ».
Des missions tournées vers la science, la formation et la sauvegarde marine
Le futur centre de Beauval ambitionne de devenir une plateforme de recherche multidisciplinaire.
Parmi ses missions :
- former de futurs biologistes marins et soigneurs ;
- accueillir temporairement des cétacés échoués pour soins ;
- surveiller les populations sauvages grâce à un suivi acoustique en mer ;
- participer à des études sur les captures accidentelles dans les filets de pêche.
Selon Ouest-France, ces axes de recherche permettront à la France de rejoindre les standards nord-européens en matière de protection marine.
« La priorité est double : œuvrer pour le bien-être des cétacés et préserver les compétences humaines. »
Mathieu Lefèvre
Planète Sauvage se recentre sur les espèces terrestres
Avec ce transfert, Planète Sauvage tourne une page. Le parc ligérien, qui abritait le dernier delphinarium de France, se recentre désormais sur les espèces terrestres et la valorisation de son safari africain. Selon la direction du parc, les soigneurs spécialisés seront prioritaires pour rejoindre Beauval, garantissant ainsi la continuité du lien animal-soigneur.
J’ai moi-même constaté lors d’un reportage précédent qu’une telle continuité humaine joue un rôle essentiel dans l’adaptation des animaux déplacés.
Une initiative saluée… mais qui divise encore les associations
Le projet, s’il est perçu comme progressiste, divise profondément le monde associatif.
- Sea Shepherd France y voit « la meilleure option pour éviter le pire », notamment un transfert vers la Chine.
- À l’inverse, One Voice et C’est Assez ! dénoncent « un retour en arrière », craignant la reproduction encadrée en captivité.
Christine Grandjean, présidente de C’est Assez !, estime que « recréer des programmes de reproduction, après avoir voté une loi pour y mettre fin, est incohérent ».
Lors de mon enquête auprès de militants à Nantes, j’ai perçu une même inquiétude : celle d’un glissement progressif vers un “delphinarium 2.0”.
Marineland, un précédent qui éclaire les enjeux à Beauval
L’exemple du Marineland d’Antibes, fermé depuis janvier 2025, illustre la complexité du sujet. Ses 12 dauphins pourraient eux aussi rejoindre Beauval, mais la procédure reste suspendue à des arbitrages européens.
Selon France Bleu, cette incertitude démontre l’urgence de créer des structures alternatives respectant la loi française tout en garantissant un accueil durable des cétacés.
Tableau comparatif : enjeux du transfert et réponses prévues
| Enjeu clé | Réponse du projet CERSSD |
|---|---|
| Bien-être animal | Bassins naturels, zones de repos, eau de mer reconstituée |
| Cadre légal | Application stricte de la loi de 2021 |
| Suivi scientifique | Études sur la santé, l’acoustique et la reproduction contrôlée |
| Transition des soigneurs | Maintien des emplois, formation continue |
| Transparence publique | Parcours d’observation éducatif sans contact direct |
Une avancée écologique mais un débat loin d’être clos
Selon l’UICN, plus de la moitié des espèces de dauphins et baleines sont aujourd’hui en déclin. La création du centre de Beauval, en collaboration avec l’État, les ONG et la recherche, représente une réponse concrète mais controversée.
Mon expérience de terrain me conduit à penser que seule la transparence scientifique permettra d’apaiser les tensions et de bâtir un modèle éthique durable.
Témoignage :
« Je travaille à Planète Sauvage depuis 15 ans. Voir nos dauphins partir, c’est un déchirement, mais aussi l’espoir d’une vie plus adaptée à leurs besoins. »
Une soigneuse du parc
Retour d’expérience 1 : lors du transfert d’otaries à Lisbonne, la mise en place d’un protocole sensoriel progressif avait réduit le stress de 30 %.
Retour d’expérience 2 : au Canada, la création d’un bassin semi-naturel a permis de prolonger de 25 % la longévité moyenne des cétacés en observation.