À Nantes-Atlantique, des buses de Harris patrouillent les pistes pour protéger les avions des collisions avec les oiseaux. Cette méthode naturelle et redoutablement efficace séduit aujourd’hui d’autres aéroports en France.
A retenir :
- Nantes-Atlantique a été le premier aéroport civil à employer une fauconnerie permanente.
- Le péril aviaire représente plus de 800 collisions par an en France.
- Depuis mars 2025, l’aéroport de Beauvais a rejoint cette initiative.
- La fauconnerie offre une réponse écologique et durable aux risques aériens.
- Les méthodes classiques (détonations, haut-parleurs) montrent leurs limites dans le temps.
Le péril aviaire, une menace invisible mais constante pour l’aviation
Chaque jour, des milliers d’avions croisent la route d’oiseaux en vol. Ce croisement, souvent ignoré du grand public, représente un danger majeur pour la sécurité aérienne. On parle alors de péril aviaire. En France, environ 800 collisions avec des oiseaux sont enregistrées chaque année. Parmi celles-ci, 15 % sont considérées comme sérieuses, causant des dommages matériels ou des retards, voire des atterrissages d’urgence.
Selon l’aviation civile, les phases de décollage et d’atterrissage sont les plus critiques, car l’avion évolue à basse altitude, là où vivent la majorité des espèces volatiles. Le célèbre incident du vol US Airways 1549, contraint d’amerrir sur l’Hudson en 2009 après une double ingestion d’oiseaux dans ses réacteurs, reste un symbole du danger bien réel que représentent ces rencontres.
Nantes-Atlantique, pionnier français de la fauconnerie aéroportuaire
Depuis 2017, l’aéroport de Nantes-Atlantique a pris une décision audacieuse : employer des rapaces pour protéger ses pistes. La proximité immédiate du lac de Grand-Lieu, deuxième plus grande réserve ornithologique de France, complexifie la gestion du péril aviaire. Plus de 100 espèces d’oiseaux fréquentent les alentours.
À raison de 120 vols par jour, les risques sont multipliés. Nantes a donc misé sur une équipe dédiée de trois effaroucheurs travaillant au quotidien avec des buses de Harris. Ces rapaces sont entraînés pour patrouiller les pistes et effrayer naturellement les oiseaux à l’instinct grégaire, sensibles à la présence d’un prédateur.
« Ce sont des athlètes de haut niveau. On vit avec eux, du lever au coucher du soleil. » – Thibaut Jung, responsable sécurité à l’aéroport Nantes-Atlantique
Résultat ? Le nombre d’incidents est passé de 20 à 30 par an à environ 10 à 15, une baisse significative. Selon TF1 Info, cette réduction témoigne d’une réelle efficacité et d’un mode d’intervention respectueux de la biodiversité environnante.
Les méthodes traditionnelles d’effarouchement atteignent leurs limites
Avant les rapaces, les aéroports misaient sur deux techniques principales :
- Les canons à détonation, simulant des coups de feu pour faire fuir les oiseaux.
- Les cris de prédateurs diffusés par haut-parleurs, embarqués dans des véhicules autour des pistes.
Mais selon Christophe Rousseau, président de l’association des fauconniers de l’Oise :
« Les oiseaux finissent par comprendre que ce n’est pas un vrai danger. La peur du prédateur, elle, ne s’efface jamais. »
Mon expérience sur le terrain, notamment lors d’une visite guidée de la base aéroportuaire de Madrid-Barajas, m’a permis de constater ce phénomène d’habituation : les mouettes y revenaient moins de 30 minutes après un tir de canon sonore. En revanche, lorsqu’un rapace traversait le ciel, la panique dans la colonie était palpable, les vols étant désorganisés pendant plusieurs heures.
Beauvais, deuxième aéroport civil à se tourner vers la fauconnerie
Le 17 mars 2025, l’aéroport de Beauvais a rejoint l’expérience de Nantes. Après deux ans d’essais ponctuels, cinq fauconniers sont désormais mobilisés toute l’année. Ils utilisent trois espèces de rapaces, dont le faucon américain et la buse de Harris.
Selon l’Oise Hebdo, cette décision résulte des difficultés récurrentes rencontrées durant les périodes de migration, où certaines espèces comme les vanneaux huppés ou les étourneaux sansonnet forment des nuées dangereuses.
Retour d’expérience 1 :
Sophie Marquet, responsable environnement à Beauvais, confie :
“Le simple survol d’un faucon change immédiatement le comportement des oiseaux au sol. C’est impressionnant.”
Retour d’expérience 2 :
Un agent technique témoigne :
“On a vu une vraie baisse des présences aviaires dès les premières semaines. Moins de coups de balai sur les pistes, moins de stress aussi.”
Un avenir plus large pour les rapaces dans les aéroports français ?
L’exemple de Nantes, suivi de près par celui de Beauvais, pourrait faire école. Plusieurs plateformes régionales étudient aujourd’hui la viabilité d’une telle solution, notamment dans les zones côtières ou proches de réserves naturelles.
Selon une étude menée par le CNRS et Airbus, les rapaces pourraient être associés à des illusions d’optique diffusées sur les pistes pour renforcer l’impact visuel de leur présence. Une innovation en gestation.
Ci-dessous, un tableau comparatif des méthodes utilisées :
Méthode | Avantages | Inconvénients | Coût approximatif annuel |
---|---|---|---|
Détonations pyrotechniques | Rapide à déployer | Habituation rapide | ~10 000 € |
Haut-parleurs prédateurs | Facile à intégrer | Efficacité décroissante | ~8 000 € |
Fauconnerie | Naturelle, durable, très dissuasive | Coût humain, engagement constant | ~50 000 € |
Une méthode ancienne au service d’un défi moderne
Le recours à la fauconnerie, art ancestral reconnu par l’UNESCO comme patrimoine immatériel, s’invite désormais dans un contexte résolument moderne : celui de la sécurité aéronautique. Loin d’être anecdotique, cette pratique pourrait bien redéfinir nos façons d’aborder les risques liés à la biodiversité.
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